בס״ד
De l’Inde (Hodou) à l’Ethiopie (Couch)
par Shmouel Darmon *
Dracha de Pourim 5783
Il est écrit au début du Ets Haim qu’avant la Création du monde, la lumière divine remplissait tout. Puis Hachem a créé un espace, en écartant la lumière sur les côtés. C’est dans cet espace qu’Il a créé tous les mondes. Cette notion est représentée par la forme de la lettre Aleph : les deux Youd situés à l’extrémité du Aleph représentent la lumière qui a été écartée sur les côtés, tandis que le Vav central correspond à l’espace vacant, dans lequel les mondes vont être créés.
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Il est écrit dans l’ouvrage ‘Baal Chem Tov ‘al haTorah’ (Béréchit, § 28) : « À présent, la Torah se revêt dans des histoires, comme celles qui mentionnent les personnages de Lavan et de Bil’am. Toutefois, dans l’avenir, il sera expliqué comment chaque passage de la Torah parlait uniquement de D.ieu, que Son Nom soit béni, ainsi que de la construction des mondes supérieurs et inférieurs. C’est là ce que le prophète déclare : ‘Une nouvelle Torah sortira de Moi’, c’est-à-dire que Je vous fournirai l’explication selon laquelle tout ne parle que de Moi ».
D’après cette explication, même A’hachvéroch (nom du roi Assuérus en hébreu) représente un habit dont Hachem se revêt.
On remarquera que le nom A’hachvéroch est écrit en malé (אֲחַשְׁוֵר֑וֹשׁ) au début de la Méguila, alors, qu’à la fin de la Méguila, il est écrit en ‘hasser (אחשרש bien qu’il se lise A’hachvéroch, comme s’il était écrit en malé). Les deux lettres vav ont disparues.
Les lettres du mot A’hachvéroch forment l’anagramme de l’expression « a’h chorech vav », littéralement « frère racine vav » … Dans notre monde, le bien et le mal semblent nettement séparés. C’est le monde de la dualité. En revanche, dans le monde d’Atsilout, le monde de la proximité au divin, il n'y a plus de séparation. Le bien et le mal procèdent d’une même origine, d’une même racine. Ils sont frères … Tel est le sens d’A’hachvéroch : frère à la racine … Mais, quand il apparaît en malé, le vav qui est l’espace vacant cache cette réalité. On a l’impression que Hachem n’est pas là, car comme le dit Rabbi Na’hman de Breslev zatsal dans le Likouté Moharan (Torah 64), la création du monde procède d’un paradoxe. Si Hachem se retire pour permettre au monde d’exister, Il n’est donc pas présent dans le monde … Or, il est évident qu’Hachem remplit aussi le monde …
L’histoire de la Méguila correspond à la phase où Hachem semble se mettre à l’écart. Discret, Son Nom n’apparaît pas dans la Méguila. Pourtant, tous les événements qui s’enchaînent ne sont pas fortuits. Seule la main divine guide les événements du début à la fin. En réalité, c’est seulement à la fin de la Méguila que les voiles sont ôtés : en quelque sorte, l’espace vacant disparaît. Le Vav se retire d’A’hachvéroch et il apparaît comme « a’h chorech », soit « frère à la racine ». Cependant, même si l’espace vacant se retire, on ne retourne pas pourtant à l’avant création … Le monde continue à exister … Qu’est donc devenu l’espace vacant ? Il est devenu la parole … Car même si A’hachvéroch n’est plus écrit de la même façon, il continue à être prononcé de la même manière.
וַיְהִ֖י בִּימֵ֣י אֲחַשְׁוֵר֑וֹשׁ ה֣וּא אֲחַשְׁוֵר֗וֹשׁ הַמֹּלֵךְ֙ מֵהֹ֣דּוּ וְעַד־כּ֔וּשׁ שֶׁ֛בַע וְעֶשְׂרִ֥ים וּמֵאָ֖ה מְדִינָֽה׃
Le premier verset de la Méguila (Esther 1, 1) signale qu’A’hachvéroch régnait sur 127 provinces, depuis l’Inde (hodou) jusqu’à l’Ethiopie (couch). A’hachvéroch représente un habit dont Hachem se revêt. Les valeurs numériques des mots « hodou » et « couch » s’avèrent porteuses de sens : hodou s’élève à 15, et couch à 326. Leur somme donne 341, ce qui est lu comme 340 et 1. 340 c’est Chem, le Nom. Donc 341, désigne l’unité (1) du Nom (Chem) divin. En faisant intervenir la méthode du mispar katan, on remarque que le mot « couch » équivaut à 11, soit Vav Hé. En revanche, hodou faisait 15, soit Youd Hé, en valeur numérique normale. Ainsi, l’empire dont parle la Méguila s’étend de Youd Ké (Hodou) à Vav Ké (Couch), ce qui renvoie à l’unification du Nom divin.
Il y a deux aspects qui semblent antagonistes : d’un côté hodou, lié à hodou laHachem ki tov, rendez hommage à Hachem car Il est bon. Hodou fait référence au monde de la spiritualité, celui de la Torah et des mitsvot. En revanche, Couch renvoie au monde des taavot et de la matière. On voit que la royauté divine s’étend depuis Hodou jusqu’à Couch : elle intègre donc à la fois la spiritualité (Youd Ké) et le monde de la matière (Vav Ké). C’est ce dernier qui a été attaqué par Amalek, car il est écrit כִּֽי־יָד עַל־כֵּס י-ה « Ki yad ‘al kess Y-ah » (Chémot 17, 16), car la main s’est portée vers Y-ah (Youd Ké) qui a été mis à l’abri (kess renvoie à kissoui, une protection qui couvre).
Pour que le Nom soit unifié, il faut lier la spiritualité au monde profane, de façon à élever celui-ci.
* Samuel Darmon, auteur de plusieurs ouvrages, est présenté sur une autre page de ce site: https://editionsbakish.com/node/1649 (note de l'éditeur).
© Hotsaat Bakish et/ou Shmouel Darmon.
Kiryat Ata, le 10 mars 2023.