Rabbi Acher ben Ye'hiel
Rabbi Acher ben Ye'hiel (1250-1327) fut le plus grand Rabbin d'Allemagne, suivant la mort de son maître Rabbi Méir (Maharam) de Rottenburg, et ensuite le chef spirituel d'Espagne, succédant au Rabbi Salomon ben Adret (Rachba). Mais son plus grand apport fut son code de lois Piské HaRoch sur lequel fut notament [1] basé le Choul'han 'Aroukh, code qui gouverne la vie des juifs pratiquants jusqu’à ce jour.
Le Roch a fui l'Allemagne avec sa famille à la mort de son maître. Il passa quelques temps en Provincia en route pour Barcelone et Tolède où il fut nommé rabbin de la communauté. Il se trouva à Montpellier en 1303. Pour le Roch, Montpellier fut «une grande ville en Israël d’où la torah émane à tous ceux qui la cherchent, mais ses princes sont comme des daims (cf. Lamentations 1,6 et T.B. Chabbat 119b). Ils se cachent le visage et manquent d'enlever les pierres d’achoppement. Par conséquent, tous font ce que bon leur semble. . . Les juifs de Provincia sont cultivés, polis et sages mais en regardant de plus près on trouve que seuls certains prennent la Torah à cœur. Et ils disaient qu'ils ne pouvaient rien faire[2] sans la coopération des autorités » - (Minchat Kenaot, lettres 51 et 101).
Le chef d'œuvre de Rabbi Acher, le Piské HaRoch (ou tout simplement, HaRoch) est un code semblable à celui d'Alfassi sans pour autant inclure des éléments aggadiques ni des lois sans usage actuel. Mises à part les décisions et leurs sources, les commentaires et les discussions aident à élucider le sujet et à fournir les raisons des décisions. On y résume les explications des Tosafot, de Rambam et des Sages espagnols. On peut trouver les Piské HaRoch à la suite de plusieurs traités du Talmud dans l’édition standard.
Or, le troisième des huit fils de Rabbi Acher, Rabbi Jacob, rédigea un digest de cette oeuvre intitulé Kitsour Piské HaRoch. II composa aussi un code (Arba’ Tourim) qui servit de modèle, quant à sa structure, pour le Choul'han ‘Aroukh. Enfin, Il composa aussi un commentaire sur la Torah dans lequel il introduisit chaque section par des guématriot « afin d’attirer l’attention du lecteur ». Chose curieuse, c'est justement ces divertissements qui restent toujours appréciés. Il est possible de les goûter dans les Mikraot Guedolot sous le titre Baal BaTourim
Rabbi Acher nous a légué aussi des clés importantes pour mieux comprendre les Tosafot. A part ses Piské HaRoch qui présentent les Tosafot traitant de la halakha - mais dans une formulation différente et parfois plus claire - il composa les Tossafot HaRoch qui s’avèrent être une source parallèle aux Tosafot imprimés dans le Talmud. Elle commente les mêmes sujets et pose les mêmes questions mais dans d'autres termes. Cette oeuvre se distingue par son style lapidaire et la clarté de ses explications. Les Tosafot HaRoch sont soit une collection que le Roch porta avec lui quand il immigra en Espagne, soit un compte-rendu des discussions avec ses disciples (parmi eux, R. Yeru'ham et R. Echtori HaPar’hi) dans la yeshivah célèbre qu’il dirigea à Tolède.
Il est possible de les étudier dans des éditions critiques [3] ainsi que dans des anthologies des commentaires sur les diverses traités du Talmud [4].
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NOTES
[1] Avec les codes du Rif et du Rambam.
[2] Ceci à la veille de la deuxième controverse maïmonidienne.
[3] Telles que celle sur Bava Metsia, éditée par M Hirschler et J.D. Grodzitsky publiée en Israel en 1959.
[4] Kovetz MeForchim.
Texte de Y. Maser (2015), Les Sages de Provincia