בס"ד
לע"נ יוני שלום בן ישראל ע"ה
Les aliments produits par l’abeille sont-ils cachers ?
Note halakhique
par
אליהו בקיש
Ces pages n’ont pas pour objectif de fixer la halakha à suivre mais simplement de donner au lecteur des éléments afin d’en savoir plus et de savoir comment interroger son Rav. J’encourage chacun à se renseigner auprès d’une autorité compétente pour toutes les questions de cacheroute qui se présentent à lui.
On trouvera ci-après des informations au sujet :
- du miel d’abeille
- de la gelée royale
- du « miel de sapin ».
- de la cire d’abeille, du pollen et du propolis.
miel d’abeille
Le principe de base est énoncé dans la Michna Békhorot (5b):
הטהור טהור: שהיוצא מן הטמא טמא והיוצא מן
Ce qui sort d’un élément impur est impur, et ce qui sort d’un élément pur est pur.
A la suite de cette Michna le Talmud (Békhorot 7b) s’interroge sur le statut du miel qui sort pourtant du corps de l’abeille (animal impur): Comment se fait-il que le miel soit tout de même cacher ?
? מפני מה אמרו דבש דבורים מותר
מפני שמכניסות אותו לגופן ואין ממצות אותו מגופן
La Guémara répond que le miel d’abeille est permis à la consommation puisqu’il n’est pas une partie de l’abeille mais ne fait que passer dans son corps.
Le Choul’hane ‘aroukh dans sa partie Yoré dé’a (chapitre 81) traite du statut des éléments provenant de quelque chose d’impur (par exemple il est mentionné que la consommation de lait ou fromages provenant d’un animal impur, est interdite).
Dans la halakha 8 il est écrit que le miel d’abeille est permis. Cette permission reste valable même si pour séparer le miel du corps (ou de parties) d’abeilles s’y trouvant mêlé on doit faire bouillir le tout. Or comme la cuisson d’un aliment fait sortir son goût, si des abeilles sont chauffées dans du miel, ce dernier sera imprégné d’un goût d’abeille (« ta’am pagoum »). Malgré cela, le miel d’abeille est permis puisque le goût est « pagoum ». À propos de la notion de « ta’am pagoum », voir le Choul’hane ‘aroukh, partie Yoré Dé’a (chapitre 103) où il est énoncé que si un élément non cacher qui n’a pas bon goût est mélangé avec un élément cacher, ce dernier n’est pas interdit [1].
Les livres des Rabanim contemporains sur le sujet vont en ce sens.
- Le Rav Vayé [2] explique que le miel est composé de 80% de sucre et de 20% d’eau. Les enzymes contenues dans la salive de l’abeille servant à transformer le suc en miel ne représentent que 0.1% du miel et sont annulés. Par ailleurs il est rare que des morceaux du corps des abeilles subsistent dans le miel puisque le miel est filtré. Evidemment, si on en remarque clairement il ne faudra pas les consommer. Quant aux petites miettes foncées que l’on trouve souvent sur le couvercle et dans le miel, ce ne sont que des restes de cire et de fleurs et elle sont donc autorisées à la consommation.
Toutefois il faudra prendre le miel avec hekhcher (garantie de cacheroute) de peur qu’il n’ait pas été filtré convenablement. En effet, en Israël, il y a déjà eu des cas de contrefaçons de miel dont la qualité laissait à désirer. En France : Le consistoire, dans sa liste [3], permet toute marque sauf le « miel de sapin » (voir ci-dessous), peut-être n’y a-t-il pas de problème de contrefaçons dans ce pays. [4]
- Le Rav Réva’h[5] dit qu’il n’y a pas à craindre de trouver des morceaux d’abeilles dans le miel puisque de nos jours le miel est bien filtré.
Celui qui veut être plus strict ne prendra que du miel avec hekhcher (garantie de cacheroute) - surtout dans les pays où il y a déjà eu des cas de contrefaçons de miel (voir plus haut).
Gelée royale
La gelée royale est un liquide qui provient de glandes spécifiques situées dans la tête de l’abeille. Ce liquide sert à nourrir les larves et en particulier celles appelées à devenir reines, d’où son nom de « gelée royale ». Elle est produite par le corps de l’abeille. Ce liquide étant très amer il ne peut être consommé tel quel. Avant commercialisation il est en général mélangé avec 40 ou parfois même 100 fois plus de miel. |
On se trouve devant un dilemme lorsqu’on veut déterminer si ce produit est cacher ou non :
- D’un côté il sort d’une bête impure et devrait donc être interdit, d’après le principe énoncé plus haut que ce qui sort d’un élément impur est impur.
- Mais d’un autre côté, il s’agit de quelque chose dont le goût n’est pas bon (ta’am pagoum) et qui n’est pas consommable tel quel.
- Aussi, la majorité des décisionnaires ne considère pas la gelée royale comme une partie de la bête mais la rapproche d’un excrément. Or s’il est vrai qu’on a l’habitude de s’abstenir de manger les excréments d’insectes, il ne s’agit pas dans notre cas de manger telle quelle la gelée royale, mais mélangée avec du miel. [Voir plus bas si on veut la manger telle quelle].
Quel est donc son statut quant à la consommation de ce produit ?
- Certains interdisent.
- D’autres décisionnaires (la majorité) ont adopté une conduite intermédiaire : ce produit ne sera permis que pour des besoins médicaux. Dans notre cas, on n’entend pas par « besoin médicaux » une maladie grave : même un malade qui n’est pas en danger (comme quelqu’un qui voudrait se renforcer en prenant des vitamines ou un supplément alimentaire à base de gelée royale) pourra en prendre.
- Certains décisionnaires permettent. C’est le cas de Rav Chelomo Moché ‘Amar chlita ancien Richone létsione (Grand rabbin séfarade d’Israël) et actuel Grand rabbin de Jérusalem, qui a permis la gelée royale sans aucune restriction (lékhat’hila) même sans aucun besoin médical. [6]
Cette permission concerne-t-elle la gelée royale pure qui n’a pas été mélangée ?
J’ai reçu deux réponses qui se complètent à ce sujet.
- Le rav Réva’h m’a répondu au nom de Rav ‘Amar qu’il est permis de manger de la gelée royale pure [7]. Toutefois celui qui veut se montrer plus strict peux mélanger la gelée dans du miel (ou tout autre aliment) de façon a ce qu’il y ait une majorité de miel.
- Rav Moche Vayé m’a répondu que la gelée royale seule ne peut pas être commercialisée car ce produit s’abime très vite. D’après lui il n’y a donc pas de produit « 100% gelée royale ». Les produits étiquetés ainsi contiennent donc d’autres ingrédients (dont il faudrait pouvoir s’assurer de leur cacheroute). Le Rav Vayé a émis tout de même l’hypothèse de la possible production d’un produit « pur » [8], suite à l’utilisation de nouveaux conservateurs. Pourtant, en Nissan 5773 (2013), il n’avait jamais entendu parler de tels conservateurs. A noter : le Rav Vayé, lui-même, dans son livre Bdikat Hamazone Kéhilkheta ,Vol.1 page 149 indique qu’il faut se montrer strict et ne pas en manger. [9]
Il ressort donc que d’après la stricte halakha, la gelée royale pure est cachère (à condition qu’aucun ingrédient non cacher n’y ait été mélangé). Ceux qui veulent se montrer strict pourront la mélanger dans une majorité de miel.
L’avis du grand rabbinat d’Israël [10] : il faudra inscrire la gelée royale sous l’appellation « Cacher pour les consommateurs de gelée royale ». Toutefois on ne pourra pas inscrire cet aliment sous l’appellation « Méhadrine » (niveau de cacheroute élevé).
« miel de sapin » (honeydew, miellat, tal dvach)
Le Rav Vayé[11] explique que des petits moucherons verts (kenimot ‘alé) suçant le jus des feuilles de légumes (comme la salade, les épinards, le persil, la menthe…) le rejettent sous forme de liquide sucré après l’avoir transformé dans leur corps. Les abeilles accumulent ce jus dans leurs ruches. Ce produit est principalement commercialisé en Europe.
Les décisionnaires contemporains l’interdisent : c’est par exemple le cas de Rav Eliyachiv, ou de Rav Nissim Karelits (et c'est également le cas de la liste du Consistoire de Paris).
Cire d’abeille, Pollen et Propolis
La cire d’abeille
D’après les scientifiques, voici comment est produite la cire d’abeille : l’abeille mange une partie du miel qu’elle produit, ce miel se transforme en sang puis en cire (il faut cent grammes de miel pour produire dix grammes de cire). Elle rejette ensuite la cire liquide, qui se solidifie au contact de l’air, sous forme de sortes de petites planches fines (les abeilles construisent ensuite leurs ruches avec la cire). La ruche sert à pondre les œufs, faire grandir les larves, et à stocker le miel. La cire en elle-même n’a pas de goût mais est imprégnée d’une odeur et d’un goût de miel.
La cire provient donc du corps même de l’abeille. D’où la question de son statut halakhique : peut-on sucer ou manger la cire d’abeille ?
La Michna de ‘Avoda Zara 2/7 enseigne que certaines choses produites par des non juifs sont autorisées, comme par exemple le lait des non-juifs (si un juif se tient à côté pendant la traite). Le miel des non-juifs est également autorisé ou encore... les douvdavniyot.
Les douvdavniyot
דף לט,ב משנה ואלו מותרין באכילה חלב שחלבו <עובד כוכבים> {גוי} וישראל רואהו והדבש והדבדבניות.
Il y a discussion entre Rachi et le Rambam sur l’explication du mot douvdavniyot : selon Rachi il s’agit de grappes de raisin. Mais selon le Rambam il s’agit bien de la cire d’abeille.
Quoi qu’il en soit (même si on explique la Michna comme Rachi) la cire est permise à la consommation puisqu’on n’a jamais trouvé aucun Rav qui l’interdit. Et il est bien évident que si un produit, qui existe depuis toujours avait été interdit, quelqu’un en aurait parlé.
Deux thèses s’opposent pour expliquer la raison de cette permission :
- Certains scientifiques estiment que la cire provient du corps même de l’abeille, mais nos sages tranchent autrement. Le principe est que lorsqu’il y a opposition claire entres les sages et la science on suit l’avis des sages.[12]
- D’autres, pensent qu’il n’y a aucune opposition entre la science et la Torah: la cire provient bien du corps même de l’abeille. Et malgré tout elle est permise. En effet, puisque la cire n’a aucun goût, il n’y a aucune raison de l’interdire. Cela étant assimilable à un morceau de bois qui sortirait d’un animal impur que jamais personne n’a interdit.[13]
Quoi qu’il en soit la halakha est claire, la consommation de la cire d’abeille est permise.
Le pollen et la propolis (résine)
Ils sont rassemblés par l’abeille et ramenés à la ruche, collés à ses pattes. La résine sert aux abeilles comme colle, pour momifier et désinfecter.
Puisque ces deux éléments n’entrent absolument pas dans le corps de l’abeille il est évident qu’ils sont permis. Toutefois il faudra faire attention à d’autres points :
- dans le pollen, il y a souvent des pattes d’abeilles et des moucherons mélangés. Il ne sera donc permis qu’après vérification.
- dans la propolis brute il est quasiment impossible de bien vérifier l’absence d’insectes ; c’est pourquoi seule celle en solution liquide pourra être utilisée. Toutefois il faudra faire attention à la cacheroute des autres ingrédients mélangés de nos jours avec la propolis (comme l’alcool par exemple).[14]
L’avis du grand rabbinat d’Israël[15] : Il faudra inscrire la propilis sous l’appellation « Cacher ». Toutefois on ne pourra pas inscrire cet aliment sous l’appellation « Méhadrine » (niveau de cacheroute élevé).
Une boîte de propolis (voir la photo sur le document pdf joint) |
Remarquer la garantie de cacheroute (en bas à gauche)
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Pour conclure, je tiens à féliciter toute personne s’intéressant aux sujets de la cacheroute, oh combien importants pour la santé spirituelle de chaque Juif !
Qu’Hachem nous aide à toujours pouvoir manger cacher et qu’Il nous sauve de tout aliment non cacher, aussi petit soit-il…
Références
Choul’hane ‘aroukh, Yoré dé’a chapitres 81, 103
Consistoire de Paris, Liste des produits cachers
Grand rabbinat d’Israël (5775), Hachga’ha bekachroute. Le guide des surveillants rabbiniques en cacheroute, chevat 5775/2015, Jérusalem
Michna Békhorot
Réva’h ,Rav, Tola’at chani, volume 1
Talmud babli, Békhorot
Vayé, Rav, Bedikat hamazone kéhilkheta, vol. 1, page 146, note 26.
Pour citer ce texte :
Eliyahou Bakis (2015), « Les aliments produits par l’abeille sont-t-ils cachers ? Note halakhique », nouvelle édition révisée et augmentée. © Hotsaat Bakish, ISBN numérique : 979-10-90638-05-1 - août
[1] Par exemple, le Choul’hane ‘aroukh (halakha 4) permet un miel fabriqué par un non-juif dans un ustensile où a cuit de la viande non cachère, puisque le goût de viande donne un mauvais goût au miel.
[2] Dans Bedikat hamazone kéhilkheta , vol 1 page 146, note 26.
[3] Avertissement : La liste évolue régulièrement, il faut donc se tenir informé des mises à jour auprès d’un Rav ou du Consistoire de Paris.
[4] Toutefois les autorités sanitaires auraient récemment averti que des miels de très mauvaise qualité circulent sur le marché français.
[5] Dans Tola’at chani, volume 1, pages 78-80.
[6] Rapporté par Rav Réva’h dans Tola’at Chani, volume 1, page 81, note 31.
En lisant la réponse de Rav ‘Amar (rapportée dans le livre Tola’at Chani), je pensai que la permission ne concernait que la gelée royale mélangée avec du miel ou autre chose. En Nissan 5773 j’ai posé la question au téléphone à rav Réva’h. Ce dernier a relu toute la réponse de Rav ‘Amar et voici ces conclusions : la gelée royale est permise TELLE QU’ELLE d’après la stricte halakha. Celui qui veut se montrer plus strict pourra mélanger la gelée dans une majorité de miel (par exemple 1 cuillère de gelée pour 1 cuillère et demie de miel). Il n’y a pas besoin de soixante fois plus.
Au passage : Je tiens à exprimer ma reconnaissance à ce genre de Rav qui malgré leur emploi du temps extrêmement chargé (et d’autant plus à la veille de pessa’h) sont prêts à se plonger dans une réponse halakhique afin d’énoncer clairement la halakha à quelqu’un… qu’ils ne connaissent même pas !!!
[7] Car son goût est “pagoum”. Voir également livre Bdikat Hamazone Kéhilkheta, Vol.1, page 149, qui donne la même raison. Mais concrètement il tient qu’il faut se montrer strict et ne pas en manger.
[8] « 100% gelée royale ».
[9] Ce qu’il a répondu ici sert à ceux qui s’appuient sur la décision de ceux qui permettent ou pour ceux qui en prennent pour des besoins médicaux.
[10] Rapporté dans le livre Hachga’ha bekachroute. Le guide des surveillants rabbiniques en cacheroute (page 94) publié par le Grand rabbinat d’Israël, chevat 5775.
[11] Dans Bdikat hamazone kéhilkheta, vol .1, page 146, note 26.
[12] On retrouve ce sujet pour la génération spontanée, est-ce qu’une bête peut se créer à partir de moisissures, sans reproduction. Pour plus d’informations au sujet des contradictions entre la Torah et l’état actuel de la science, voir livre de Rav Vayé vol 1 page 108 note 22 ; voir également vol 1, page 146 et 147 dans la note 27 du même livre.
[13] Tola’at chani, vol.1, pages 79-80, note 29.
[14] Tola’at chani, vol. 1, page 80.
[15] Rapporté dans le livre « Hachga’ha bekachroute » - Le guide des surveillants rabbiniques en cacheroute (page 94) publié par le Grand rabbinat d’Israël en chevat 5775.