Le compte du ‘Omer et sa dimension morale :
travail sur soi et progression personnelle
אבני ספיר - בנושא ספירת העומר
Le thème du ’Omer est développé dans la paracha Emor. Il concerne le compte des jours et des semaines qui séparent les fêtes de Pessa’h et de Chabou’ot. Après l’offrande du ’Omer, « vous compterez chacun, depuis le lendemain du jour de repos (de la fête)…, sept semaines, qui doivent être entières. Vous compterez jusqu'au lendemain de la septième semaine, soit cinquante jours… » (Vayikra 23, 15-16)[1]. Il faut donc compter à la fois les jours et les semaines (un point de halakha : seuls les hommes sont astreints à cette mitsva).
Une offrande d’orge
L’attribution du nom de « période du ‘Omer » fait allusion à une offrande des prémices de la moisson, le ‘omer étant une mesure de volume (environ 2 litres et demi[2])[3]. L’orge symbolise le domaine le plus bestial, passionnel de l'homme que nous devons offrir à Hachèm en le sublimant. L'être humain partage avec les animaux trois choses qui ne sont pas à bannir mais à mettre au service de Hachèm : l'instinct de reproduction, le besoin de se nourrir et l'attachement à son milieu naturel. Pourtant, les sentiments éprouvés en ces matières peuvent amener l’être humain à des passions qui peuvent l’éloigner de toute morale : le désir charnel est détourné en débauche, le besoin d’assurer ses besoins matériels est détourné en course à l’argent. Quant au sentiment d’attachement à sa ville et à son pays il peut devenir une passion nationaliste débouchant sur les pires cruautés[4].
Plusieurs midrachim permettent de comprendre l'importance de cette offrande d’orge, céréale plus particulièrement destinée à l’alimentation du bétail.
Un midrach enseigne : « Par l'offrande d'orge, Hachèm fait la paix entre mari et femme » [5]. Lorsque le Temple existait, la farine de blé (céréale noble) entrait dans certaines offrandes ; outre l’offrande d’orge du ‘Omer, l’orge était aussi offerte par une femme soupçonnée d’adultère : une offrande très simple faite d’une farine tirée d’une céréale pauvre pas même enrichie à l’huile ni parfumée. וְהֵבִ֨יא הָאִ֣ישׁ אֶת־אִשְׁתּוֹ֮ אֶל־הַכֹּהֵן֒ וְהֵבִ֤יא אֶת־קָרְבָּנָהּ֙ עָלֶ֔יהָ עֲשִׂירִ֥ת הָֽאֵיפָ֖ה קֶ֣מַח שְׂעֹרִ֑ים לֹֽא־יִצֹ֨ק עָלָ֜יו שֶׁ֗מֶן « L’homme amène sa femme au Kohen; il apporte pour elle son sacrifice, le dixième d’un épha de farine d’orge. Il ne coule pas d’huile dessus… » (Bamidbar 5, 15). Mais cette offrande ramenait le Chalom dans le couple ; elle ramenait à une situation qui doit être la règle entre un mari et une épouse comme l’explique R’ Guerchon Cohen זצ"ל: « Lorsque mari et femme comprennent que leur vie conjugale n'est pas une satisfaction égoïste de leurs désirs mais l'accomplissement de la Volonté divine pour consolider leur lien, leur devoir d'altruisme et pour avoir une descendance, la paix et l'harmonie règnent entre eux » [6].
Un midrach enseigne : Haman avait offert 10000 lingots d'argent au roi A’hachvéroch (Assuérus) pour exterminer les Juifs de Perse ; lorsqu’il a compris qu’il avait échoué, il a dit : ‘Votre mitsva du 'Omer a contrecarré l'effet de mes dix mille lingots d'argent !’ [7] : « Les dix mille lingots d'argent d'Haman symbolisent, bien sûr, la puissance de l'argent. » [8]
La volonté de gagner de l’argent honnêtement ou d’économiser doit s’inscrire dans la perspective de ce qu’enseigne la mistva du ‘Omer. Tant que la présentation du ‘Omer n’était pas faite, il était interdit à tout Israël de consommer le produit de la nouvelle récolte. Comme les récoltes, nos revenus proviennent de la générosité divine ; il faut en destiner une partie à d’autres (dons à des institutions aidant les démunis, ceux qui étudient la Torah, etc.). « C'est cette conception que le peuple d'Israël avait acquise à travers la mitsva du 'Omer qui a totalement neutralisé l'effet néfaste qu'aurait pu avoir la somme d'argent fabuleuse versée par Haman auprès des ennemis d'Israël » [9] .
Un midrach enseigne aussi : « C'est par le mérite du ‘Omer qu'Abraham a hérité du pays d'Israël. » [10] Comment comprendre cette affirmation ? Le ‘Omer rappelle que l’on ne doit pas profiter de la nouvelle récolte de la terre d’Israël sans procéder à une offrande à Hachèm. Or Abraham savait que la possession du pays que Hachèm lui a promis devait être mise au service du Saint béni soit-Il. L'attachement à la patrie n'est pas un but en soi. Notre amour pour la Terre d’Israël est différent de l’amour qu’éprouvent les autres nations pour leur pays : ce n’est pas un sentiment nationaliste mais l’attachement « à la terre sainte que D. nous a octroyée pour nous donner les possibilités maximales de Le servir et de réaliser le but de notre existence »[11] .
On le voit, l’offrande du ‘Omer symbolise – et nous rappelle – que l’être humain est différent de l’animal. Nos besoins naturels, et même nos passions, doivent être imprégnés d’intentions spirituelles. Cette période du compte du ‘Omer est favorable pour renforcer, si besoin est, notre orientation en ces matières. De la sorte, après les 49 étapes de travail sur soi que constitue chaque jour de cette période, il sera possible de recevoir la Torah, lors de Chabou’ot. En ce jour de fête, ce n’est plus une céréale principalement destinée au bétail que l’on offrira à Hachèm ! En ce jour, nous serons dignes du don de la Torah et pourrons présenter l'offrande « des deux pains » faits de farine de froment[12] .
Pessa’h est inséparable de Chabou’ot
Pour le judaïsme rabbinique, le compte démarre le 2ème jour de Pessa’h. Le compte du ’Omer fournit un exemple des divergences des Sadducéens (Tsadoukim) avec les Pharisiens (judaïsme rabbinique). A l’origine, les Sadducéens constituaient une famille sacerdotale descendant de Tsadok. Les grands prêtres seront issus de cette famille jusqu'à l'époque des Maccabées (vers 150 AEC). A son époque, le prophète Yé’hézkèl (qui a vécu la déportation à Babel avec les premiers exilés - 597 AEC) tenait en haute estime les prêtres issus de cette famille הֵ֣מָּה בְנֵֽי־צָד֗וֹק הַקְּרֵבִ֧ים מִבְּנֵֽי־לֵוִ֛י אֶל־ יְיָ לְשָֽׁרְתֽוֹ׃ « Ce sont les fils de Tsadok qui, parmi les fils de Lévi, s'approchent de Hachèm pour le servir. » (Yé’hézkèl 40, 46). Mais, ultérieurement, les Sadducéens ont évolué : « l’intérêt de l’État primait l’intérêt de la doctrine et de la loi judaïques. Leur passion dominante, c’était un ardent patriotisme. La piété n’occupait que la seconde place dans leur esprit…. sans nier précisément l’immortalité de l’âme, les Sadducéens rejetaient absolument la croyance à une justice réparatrice, s’exerçant après la mort »[13].
Pour eux, « les dispositions légales, clairement énoncées dans la loi mosaïque, sont seules obligatoires ; toutes les autres, émanant de traditions orales ou émises postérieurement, n’ont pas de titres à une observance rigoureuse »[14]. Ainsi, ils ne reconnaissaient pas la Torah orale et déterminaient la halakha selon leur compréhension de la Torah écrite. Un historien juif du 1er siècle[15] écrit : « les Pharisiens avaient introduit dans le peuple beaucoup de coutumes qu'ils tenaient des anciens, mais qui n'étaient pas inscrites dans les lois de Moïse, et que, pour cette raison, la secte des Sadducéens rejetait, soutenant qu'on devait ne considérer comme lois que ce qui était écrit, et ne pas observer ce qui était seulement transmis par la tradition. Sur cette question s'élevèrent des controverses et de grandes disputes, les Sadducéens ne parvenant à convaincre que les riches et n'étant pas suivis par le peuple, les Pharisiens, au contraire, ayant la multitude avec eux »[16].
« Parmi les questions de rite qui divisaient les Sadducéens et les Pharisiens, plusieurs furent discutées avec beaucoup d’acharnement. De ce nombre était la question de la fixation de la Pentecôte, qui, selon les Sadducéens, devait toujours tomber le dimanche, c’est-à-dire le cinquantième jour après le sabbat qui suit la fête de Pâque »[17]. Il est écrit en effet: מִמָּֽחֳרַ֣ת הַשַּׁבָּ֔ת et les Sadducéens comprenaient donc ‘chabbat’ et non pas ‘lendemain du jour de repos’ (soit deuxième jour de Pessa’h). Ils attendaient donc le lendemain du chabbat qui suivait le début de Pessa’h pour commencer à compter. Pour les Saducéens, Chabou’ot pouvait survenir jusqu’à 56 jours après Pessa’h[18] (au lieu de 50).
Ces controverses sur la date de fixation de Chabou’ot peuvent sembler secondaires ou du moins simplement techniques ; une question de calendrier. Mais on aurait tort de croire cela : le refus des Sadducéens était celui du lien entre la sortie d'Egypte et le don de la Torah. Le refus des Sadducéens était celui du sens de Pessa’h’, réduit à une date du calendrier national : la libération physique d’un peuple d’une oppression étrangère. Ceci n’est pas le sens que revêt la sortie d'Egypte pour Moché et pour ses successeurs Pharisiens (et judaïsme rabbinique). La sortie d'Egypte est inséparable du don de la Torah. Pessa’h commémorait la fin de l’esclavage matériel. C’est Chabou’ot qui donne une autre dimension à la libération de Pessa’h : cette fête ne commémore pas seulement un moment de l’histoire d’Israël qui marqua la fin de l’angoisse, de la souffrance, de l’oppression. Etre libre, oui. Mais pourquoi faire ? Pessa’h commémore surtout la fin de l’assimilation à d'autres cultures, la fin de la chute fatale vers la destruction et annonce la libération spirituelle par l’accueil du don de la Torah. Cet accueil vient couronner la libération physique, en lui donnant du sens, au pied du mont Sinaï mais aussi aujourd’hui pour chacun de nous pendant la période du ‘Omer. C’est l’attente de Chabou’ot qui donne du sens à Pessa’h.
Une progression individuelle
Revenons à la signification du ‘Omer. Il s’agissait de sortir d’un niveau d’impureté quasi maximal correspondant au 49ème niveau d’impureté (on pourrait dire « moins 49 », l’impureté absolue étant située un niveau plus bas, à « moins 50 » !) [19] .
Une relation est établie entre ce verset et un autre verset de la Torah : celui où est exposé le commandement relatif à la femme nida (l'impureté menstruelle). En effet, ce dernier commence également de la même manière par « elle comptera pour elle ». Comme une femme nida, les enfants d’Israël durent se débarrasser de l'impureté contractée en vivant parmi les Egyptiens païens. Ils devaient se purifier mais pendant une bien plus longue durée (sept semaines) car cette impureté-là était plus grave que la précédente. Il y avait urgence à ce que les Hébreux quittent leur esclavage égyptien qui les plongeait dans une grande impureté). Le travail de purification nous est accessible jusqu’au 49ème degré, en revanche, le 50ème niveau ne l’est pas car il est « de l’ordre de l’union totale »[20].
Le décompte du ‘omer (ou séfirat ha’omer) s’effectue pendant sept semaines de sept jours. Ce n’est qu’après cette période que les Hébreux purent s'unir à leur D.ieu en recevant la Torah. De même qu’une femme nida perd cet état en se trempant dans l’eau du bain rituel, de même les Juifs s’immergent dans l’étude de la Torah pendant la veillée de Chabou’ot[21].
Pessa'h et la période qui commence le lendemain de la fête et va jusqu’à Chabou’ot (les jours du compte du ‘omer) sont la racine de tous les mois de l'année. Comme « le courant ira pendant ces jours et comme on s'y comportera ainsi iront tous les jours de l'année. D'où l'importance capitale de cette période » écrit le R’ Y. R. Dufour א’’שליט[22]. Il ajoute : « Nos Sages disent qu'il est impossible d'annuler la prise des forces négatives si ce n'est que très lentement… C'est pourquoi nous aurons à travailler chaque jour à la correction et à la purification d'un point particulier et non pas de l'ensemble »[23].
Il convient alors d’entreprendre un « travail qui est à la fois spirituel, moral et psychologique »[24]. Il faut avoir l’intention d'améliorer l'amour, la fraternité, la bonne relation de l'homme envers son proche et pour cela développer la bonne appréciation du prochain, la bienveillance entre tous les membres du peuple juif, entre tous ceux qui vivent dans la Torah et l'étudient en donnant de la considération, en accordant de l'honneur à l’autre, en s'éloignant des disputes, de la haine et de la jalousie[25].
Quarante-neuf mots
Le psaume 67 qu'on lit après avoir fait la bénédiction et compté le jour exprime bien cet effort progressif et fractionné : après le premier verset, il y a 49 mots et chacun d'eux est la caractéristique d'un de ces 49 jours du ‘Omer.
Comme les sept versets de ce psaume renvoient au candélabre du Bet hamikdach, le psaume est souvent calligraphié sous la forme d’un chandelier ; le verset 5 en est sa branche centrale et il compte 49 lettres[26]. Cette ménora c’est l’homme (ou la femme) « qui reçoit tout le flux de la bénédiction dans toutes les structures de son être »[27]. Pour que ce flux ne soit pas arrêté par des imperfections, chaque jour du ‘Omer apporte le tikoun, la réparation, la correction nécessaire. Il en résulte un intense travail de chacun sur soi-même, travail plus particulièrement nécessaire jusqu'au 33ème jour du ‘Omer (au moins) car, en cette période les dynamiques négatives sont particulièrement menaçantes et graves dans leurs conséquences, les forces négatives puisant leur dynamisme à l'intérieur des forces positives[28].
Le compte du ‘Omer est suivi par la lecture de la prière « ana békhoa'h » (Oh ! Par Ta force) qui est lue par ailleurs dans l’office du matin[29]. Elle est attribuée au Tana R’ Né'hounia ben Hakana זצוק"ל qui a vécu à la fin du 1er siècle. Cette prière comprend sept versets de six mots. Mais les initiales de chaque mot dans un verset formant un mot supplémentaire on arrive à 7 versets multipliés par 7 mots soit 49 mots au total. Cela correspond aux 49 jours séparant Pessa'h de Chabou’ot (tout comme le psaume 67). « Aussi, ces deux textes sont utilisés pour scander la marche d'amélioration de soi qui doit se faire chaque jour entre ces deux fêtes : un mot sera utilisé chaque jour et il sera mis en relation avec le travail à effectuer » [30].
Quel est le travail personnel à effectuer ?
Chaque semaine est consacrée au travail sur l'une de ses traits de caractère (midot) relevant de plusieurs catégories : la bonté / ‘héssèd ; la rigueur / guévoura ; la beauté / tiférète ; la constance / nétsa'h ; l'expansion de la beauté, rayonnement et splendeur / hod ; le fondement, l'union fécondante et la sexualité / yessod ; la complétude royale / malkhout...)[31].
Le tableau suivant indique quelles sont les orientations du travail pratique à réaliser. Il serait utile de préciser à présent, pour chaque jour, des thèmes pratiques de travail personnel. Des ouvrages spécialisés[32] fournissent nombre de détails et permettent un grand travail sur les midot à qui les étudient chacun des 49 jours du ‘Omer (en mettant en pratique les conseils donnés).
Ainsi, le 23ème jour étant caractérisé par la force dans l’assurance victorieuse (guévoura banétsa'h) on ne se laissera pas détourner de la réussite que donne la pratique des mitsvot.
0rientations du travail pratique à réaliser
Le processus personnel de libération est obtenu par le travail sur chaque dimension de nos tendances (midot) [33] - voir le détail dans notre ouvrage.
‘Omer
1ère semaine - Travail sur les tendances de bonté / 'héssèd
1er jour - La bonté (‘héssèd) dans la bonté (‘héssèd)
2ème jour -La rigueur (guévoura) dans la bonté (‘héssèd) [34]
3ème jour - La beauté (tiférète ) dans la bonté (‘héssèd)
4ème jour - La constance (nétsa'h) dans la bonté (‘héssèd)
5ème jour - L’expansion de la beauté (hod) dans la bonté (‘héssèd)
6ème jour - L’union (yéssod) dans la bonté (‘héssèd)
7ème jour - la complétude royale (malkhout) dans la bonté (‘héssèd)
2ème semaine - Travail sur les tendances de rigueur / guévoura
8ème jour - La bonté (‘héssèd) dans la rigueur (guévoura) [35]
9ème jour - La rigueur (guévoura) dans la rigueur (guévoura)
10ème jour - La beauté (tiférète) dans la rigueur (guévoura)
11ème jour - La constance (nétsa'h) dans la rigueur (guévoura)
12ème jour - L’expansion de la beauté (hod) dans la rigueur (guévoura)
13ème jour - L’union (yessod) dans la rigueur (guévoura)
14ème jour - la complétude royale (malkhout) dans la rigueur (guévoura)
3ème semaine - Travail sur les tendances de beauté / tiférète
4ème semaine - Travail sur les midot (tendances et attitudes) de constance / nétsa'h
5ème semaine - Travail sur les midot de rayonnement et splendeur / hod
6ème semaine - Travail sur les midot d'union fécondante et sexualité, relatives au fondement / yéssod
7ème semaine - Travail sur les midot de Complétude royale / malkhout
49ème jour - La complétude royale (malkhout) dans la complétude royale (malkhout)[41]
50ème jour Chabou’ot[42] - Complétude royale / malkhout – après le tikoun : Réception de la Torah
Nous allons tenter une mise en perspective du travail personnel à réaliser chaque jour en ce sens à travers Le Palmier de Dévora de R’ Moché Cordovéro זצוק"ל [43]. Ce livre est qualifié par R’ Dufour de « livre de moussar, morale du comportement pour l'ensemble du public, fondé sur la compréhension de toute la Torah jusqu'aux niveaux les plus intimes et les plus élevés mais traduits en modèles clairs et simples de comportement interne et externe pour tout le peuple »[44]. De fait, R’ Moché Cordovéro זצוק"ל donne nombre d’indications précises sur les sujets à travailler. Plusieurs chapitres méritent d’être étudiés dans cette perspective à propos du comportement pour que l’être humain puisse s’habituer aux implications du travail sur les différentes mesures :
- 'hessèd [45] – bonté[46], générosité[47] - L’amour porté à Hachèm sera si grand que rien d’autre ne semblera aimé[48]. « C'est ainsi qu'il s'occupera d'abord des besoins de Son culte, ensuite seulement ce qui reste ira aux autres besoins »[49].
C’est la façon dont l’être humain reçoit les influx divins qui conditionnent leur émission[50]. Plusieurs actions semblent relever de ce niveau, dont : l’instauration de la paix entre un homme et son prochain[51].
- guévoura –rigueur[52], force[53] - Plusieurs actions semblent relever de ce niveau : il s’agit de la lutte contre le penchant au mal car « tous les actes suscitant le penchant au mal éveillent réellement les rigueurs fortes.» [54] ;
- tiférète[55] – harmonie[56], plénitude[57], beauté[58] - Il est dit והתפארת זו מתן תורה (T.B. Bérakhot 58 a). Plusieurs actions relèvent de ce niveau d’harmonie et notamment tout ce qui concerne l’étude le la Torah[59]. Tiféret est symbolisée par Ya’akov qui est parvenu à associer à la fois le ‘Héssed (mida d’Abraham), et la guévoura (mida de Yits’hak).;
- nétsa'h[60] – endurance [61];constance[62] ; assurance victorieuse[63] ;
- hod [64]– expansion de la beauté[65], retentissement[66] ;
- yéssod [67]– fondation[68] ; fondement[69] ; union fécondante et sexualité[70]- Plusieurs actions semblent relever de ce niveau : un célibataire peut prendre la résolution de se marier car « tant que l'homme n'a pas pris femme, il est évident que la Chékhina n'est aucunement avec lui, puisque le principal de la Chékhina pour l'homme vient du féminin » [71]; il convient de corriger aussi « toutes les choses qui… sont cause d'incirconcision » de manière à tendre vers la circoncision du cœur[72].
- malkhout – complétude royale[73], royauté[74] - Plusieurs actions semblent relever de ce niveau : « donner la bienfaisance aux pauvres »[75] ; recevoir des invités[76] ; se fixer un lieu pour étudier la Torah[77].
Ainsi, grâce à la liberté acquise lors de Pessa’h, la période du ‘Omer est un pilotage psychologique (psychagogie) [78]. Cela permet de comprendre que même si quelqu'un a oublié de compter un jour (ou s’est trompé dans le compte d’un jour), même si son compte ne pourra plus être complet pour l’année en cours, il devra poursuivre scrupuleusement le compte (mais sans prononcer la bénédiction initiale cependant), car il doit poursuivre son travail d'amélioration[79].
Des pierres de saphir
L’immersion dans la Torah de la veille de Chabou’ot vient donc après un long travail sur soi afin d’être prêt au don de la Torah : c’est ce qu’enseigne le Or Ha’haïm hakadoch[80] : le verbe וּסְפַרְתֶּ֤ם (ousefartem / vous compterez) a la même racine que celle du mot saphir ; de ce fait, il ferait allusion au travail qui fait de la pierre brute une pierre étincelante pouvant être utilisée en joaillerie : mais auparavant, un long travail de préparation (taille, polissage) est nécessaire. Cette image peut être précisée : le Sefat Emet[81], met en relation le saphir et la pureté du Klal Yisraël, les éléments à retirer de la pierre brute symbolisant l'emprise du yétser hara’ sur les individus et le nécessaire travail sur les midot, en vue d’un perfectionnement du comportement et d’une plus grande élévation morale. Cela vaut pour l’individu. Mais l’amélioration de chaque individu du peuple d’Israël a des conséquences pour le peuple tout entier. Lorsque toutes les facettes de la pierre précieuse auront été travaillées, la pierre brillera de tous ses feux[82]. C’est à cet état d'harmonie entre individu et Klal Yisraël que sont parvenus les enfants d’Israël lors du don de la Torah.
Ces allusions au saphir peuvent, peut-être, nous mener plus avant car, dans la vision du prophète Yé’hézkèl, c’est le saphir qui apparaît sous le trône de Hachèm כִּסֵּ֑א וּמִמַּ֗עַל לָֽרָקִ֨יעַ֙ אֲשֶׁ֣ר עַל־רֹאשָׁ֔ם כְּמַרְאֵ֥ה אֶֽבֶן־סַפִּ֖יר דְּמ֣וּת « Et au-dessus de l’étendue qui était sur leurs têtes, il y avait comme l’aspect d’une pierre de saphir, la ressemblance d’un trône » (Yé’hézkèl 1, 26) וְעַל֙ דְּמ֣וּת הַכִּסֵּ֔א דְּמ֞וּת כְּמַרְאֵ֥ה אָדָ֛ם עָלָ֖יו מִלְמָֽעְלָה׃ « et, sur la ressemblance du trône, une ressemblance comme l’aspect d’un homme, dessus, en haut » (Yé’hézkèl 1, 26). R’ Meir enseigne que l’azur que contenaient les tsitsit[83] avait pour but de se souvenir de Hachèm : la pierre de saphir évoque le Trône de gloire[84].
L’amélioration individuelle permet que le peuple tout entier brille de toutes ses facettes. Car le niveau de chaque individu influence celui de toute la collectivité le Klal Yisraël, comme le montre Rabbi Chim’on Bar Yo’hay זצוק"ל dans un machal (parabole) sur les passagers d'un bateau. L'un d'entre eux commença à percer un trou dans la coque, sous son siège. Les autres passagers lui demandèrent : « Que fais tu ? » Il répondit : « Cela ne vous concerne pas puisque je perce sous ma place ! » Ils lui répondirent: « Mais l'eau monte, et nous allons couler ! » [85]
Si la collectivité est influencée en mal par chaque individu, elle a aussi besoin de chacun comme l’enseigne encore Rabbi Chim'one bar Yo’haï זצוק"ל [86] à partir de l’interprétation des mots « tout le peuple » dans un verset de Chémot: כִּ֣י ׀ בַּיּ֣וֹם הַשְּׁלִשִׁ֗י יֵרֵ֧ד יְיָ לְעֵינֵ֥י כָל־הָעָ֖ם עַל־הַ֥ר סִינָֽי׃ « car le troisième jour Hachèm descendit aux yeux de tout le peuple sur le Mont Sinaï » (Chémot 19,11). La Chékhina ne se serait pas manifestée pour le don de la Torah au Sinaï s'il avait manqué un seul homme dans le peuple d'Israël.
Vers l’harmonie
Comme le monde de la joaillerie, le monde de la musique peut faire comprendre la nécessité du compte de tous les jours du ‘Omer.
La musique peut être comparée au temps : la semaine compte sept jours, et la gamme musicale (du moins celle de nos contrées) compte sept notes. En musique, l’harmonie n'est pas atteinte par chaque note jouée séparément, mais par leur combinaison qui permet d’obtenir des compositions variées : « On est transporté par la musique dans sa totalité, par les relations et l'harmonie des notes qui se combinent pour produire la beauté spécifique de la musique, comme un tout »[87]. L’harmonie n’est pas atteinte en un seul instant, mais par l’ensemble du temps de la vie de l’homme, et à la fin de la période du ‘Omer, par un compte complet, correspondant à un travail sur soi ayant touché toutes les dimensions des tendances et attitudes de l’être humain. Alors sera atteint un niveau supérieur permettant la réception de la Torah. Alors la beauté sera complète, à l’instar d’une parure composée de 49 pierres de saphir – autre allusion du verbe וּסְפַרְתֶּ֤ם (vous compterez) qui, on l’a dit a la même racine que saphir. Lors du don de la Torah, lors de chabou’ot, chacun se présente avec sa parure ; mais certaines parures sont moins belles s’il y manque une ou plusieurs pierres précieuses ! Le ‘Omer vient nous rappeler cela : il ne faut pas oublier un seul jour, pour produire de l’harmonie, de la beauté.
L’harmonie collective à un haut niveau entre les individus et l’ensemble du peuple a déjà été atteinte par le Klal Yisraël lors du don de la Torah, mais elle a été perdue hélas suite à la chute lors de l’épisode du veau d’or. Mais bientôt, le peuple tout entier brillera de toutes les facettes de ses individus qui auront travaillé les 49 traits de caractères pendant le ‘omer : 49 est d’ailleurs la valeur numérique de לב טוב (bon cœur)[88]. Il retrouvera alors l’harmonie atteinte lors du don de la Torah ! Avec la venue du Machia’h ben David. Amen !
NOTES
[1] וּסְפַרְתֶּ֤ם לָכֶם֙ מִמָּֽחֳרַ֣ת הַשַּׁבָּ֔ת מִיּוֹם֙ הֲבִ֣יאֲכֶ֔ם אֶת־עֹ֖מֶר הַתְּנוּפָ֑ה שֶׁ֥בַע שַׁבָּת֖וֹת תְּמִימֹ֥ת תִּֽהְיֶֽינָה׃ עַ֣ד מִֽמָּחֳרַ֤ת הַשַּׁבָּת֙ הַשְּׁבִיעִ֔ת תִּסְפְּר֖וּ חֲמִשִּׁ֣ים י֑וֹם וְהִקְרַבְתֶּ֛ם מִנְחָ֥ה חֲדָשָׁ֖ה לַֽיהוָֽה׃
[2] Les enseignements sur les mesures sont fondamentaux pour appliquer la halakha. (Avis rabbinique indispensable).
[3] Il est écrit : « parle aux enfants d'Israël et dis-leur : quand vous serez arrivés dans le pays que je vous accorde et que vous y ferez la moisson, vous apporterez un ‘Omer des prémices de votre moisson au Cohen. Il balancera ce ‘Omer devant Hachém... puis vous compterez, depuis le lendemain de la fête [Pessa’h]... sept semaines qui doivent être entières... soit cinquante jours, et vous offrirez une oblation nouvelle à Hachém"... » (Vayikra 23, 9 - 22).
[4] Voir : R’ Roger Cohen (2004), Imré Cohen, Rav Guerchon nous parle, pp. 254-256.
[5] Midrach cité par R’ Roger Cohen (2004), pp. 254-256.
[6] R’ Roger Cohen (2004), pp. 254-256.
[7] Midrach cité par R’ Roger Cohen (2004), pp. 254-256.
[8] R’ Roger Cohen (2004), pp. 254-256.
[9] R’ Roger Cohen (2004), pp. 254-256.
[10] Midrach cité par R’ Roger Cohen (2004), pp. 254-256.
[11] R’ Roger Cohen (2004), pp. 254-256.
[12] D’après R’ Roger Cohen (2004), pp. 254-256.
[13] Graetz Hirsch (1853-1870), Histoire des Juifs, 2ème période, 2ème époque, chapitre 10.
[14] Graetz Hirsch (1853-1870), Histoire des Juifs, 2ème période, 2ème époque, chapitre 10.
[15] Yossef ben Matityahou Hacohen (Flavius Josèphe).
[16] Yossef ben Matityahou Hacohen, Antiquités juives, XIII, 10, 3 (texte numérisé et mis en page par François-Dominique Fournier). Autres hérétiques du Judaïsme, les Karaïtes apparaissent quelques siècles plus tard (8ème siècle) et ils refuseront aussi la Torah orale.
[17] Par ailleurs, les Sadducéens admettaient à la lettre les dispositions pénales de la Torah écrite au sujet des blessures corporelles : œil pour œil, dent pour dent. « Ils acquirent, de la sorte, une réputation de sévérité excessive dans l’exercice du droit pénal, tandis que les Pharisiens, invoquant dans ces cas des interprétations traditionnelles, usaient d’indulgence et se bornaient à imposer des indemnités pécuniaires » Graetz Hirsch (1853-1870), Histoire des Juifs, 2ème période, 2ème époque, chapitre 10.
[18] David Saada (2006), Le pouvoir de bénir, Bibliophane, Paris, p. 310.
[19] « Pendant les quarante neuf jours qui séparent la Sortie d'Egypte du don de la Torah, les individus étaient appelés à se construire personnellement en référence à la nouvelle réalité, celle d'un clal libre, dégagé de l'emprise de l'autre côté. C'est ce parcours difficile, risqué, de mise en harmonie des individus avec la sainteté de la collectivité d'Israël que nous réactualisons chaque année en comptant les jours et les semaines du Omer », écrit D. Saada (2006), p. 313.
[20] Le « 50e est de l’ordre de l’union totale qu’on ne peut partager ni continuer à vivre ici sur cette terre temporaire, ainsi qu’il a été dit à Moché lui-même » (R’ Dufour, Modia’, Emor 2004).
[21] D’après R’ Elie Munk, Kol hatorah, sur Vayikra, 1998, p. 224. D’où aussi, peut-être, la coutume d’Afrique du nord qui consistait à s’arroser les uns les autres en ce jour de Chabou’ot.
[22] « Ceux qui connaissent les orientations précises des prières disent que l'intention qui concerne ce compte du ‘Omer précède toutes les autres intentions sur toutes les autres mitsvot pendant cette période » (R’ Chalom Charabi, Na’ar ha chalom 33a, cit. R’ Yéochoua’ Ra’hamim Dufour (2011), pages sur le ‘Omer, Modia’. Na’ar ha chalom est un commentaire du Choul’han ‘Aroukh selon la kabbale, écrit par R’ Chalom Charabi זצוק"ל, dit le Rachach, rabbin yéménite du 18ème siècle qui fut Roch Yéchiva de la Y. Bet El, dans la vieille ville de Jérusalem.
[23] « Mais, ce jour-là, nous serons aidés par ce que nous enseigne la tradition concernant le point particulier qui est concerné par ce jour précis. En effet, de même que les dynamiques d'un jour de la semaine et celles du jour du Chabbat sont différentes, de même chaque jour juif a ses caractéristiques, ses forces positives ou négatives. » R’ Yéochoua’ Ra’hamim Dufour (2011), pages sur le ‘Omer, Modia’.
[24] Ecrit R’ Yéochoua’ Ra’hamim Dufour א’’שליט (2011), pages sur le ‘Omer, Modia’.
[25] D’après R’ Yéochoua’ Ra’hamim Dufour (2011), pages sur le ‘Omer, Modia’
[26] Dont « chacune manifeste également la qualité de ce jour » écrit R’ Y. R. Dufour (2011), pages sur le ‘Omer, Modia’.
[27] R’ Y. R. Dufour (2011), pages sur le ‘Omer, Modia’.
[28] D’après R’ Yéochoua’ Ra’hamim Dufour (2011), pages sur le ‘Omer, Modia’
[29] Voici la traduction proposée par R’ Y. R. Dufour א’’שליט (chacun des 6 mots hébraïques de chaque ligne est séparée par un /).
Oh ! je T'en prie / par la force / de la bonté / de Ta droite / délivre / ce qui est empaqueté et ficelé.
Reçois / la supplication / de Ton peuple / protège-nous / purifie-nous / Redoutable !
Veuille / Puissant / ceux qui désirent / Ton unité / comme la prunelle des yeux / les conserver.
Bénis-les / purifie-les / mets-les dans Ta miséricorde / Ta juste bonté / toujours / comble-les en.
Inébranlable / Saint / dans l'immensité / de Ta bonté / conduis / ce peuple qui est Ta part.
Unique / glorifié / vers Ton peuple / tourne-Toi / eux qui font mémoire / de Ta sainteté.
Nos supplications / reçois-les / et écoute / nos cris / Toi qui connais / les mystères des êtres.
On ajoute ensuite : Béni soit le Nom glorieux de Sa royauté à jamais et pour toujours.
R’ Dufour א’’שליט explique : « ceux qui savent, comme on nomme les Sages qui ont reçu par l'étude venant en son temps la tradition la plus profonde, disent que cette prière de 42 noms contient de multiples secrets et une grande puissance qui permet à l'homme de s'élever ». Le kadich est d’ailleurs « bâti sur cette même structure de 6x7 car il a la force d'assurer également la montée de celui qui le dit, de la communauté et de l'âme du défunt ». Il indique que celui qui verrait le judaïsme avancé comme un ésotérisme ferait erreur car « dans le judaïsme, les niveaux des secrets sont exactement en correspondance avec la structure du concret et avec la dynamique de la prière et des actes moraux les plus quotidiens…. On ne peut pas être soit un spécialiste de la halakha ou de l'interprétation, ou du moussar (morale), ou... ou. Mais les maîtres véritables et complets sont toujours et... et... et ils ont écrit simultanément en ces différentes branches du savoir ». D’après R’ Yéochoua’ Ra’hamim Dufour (2011), pages sur le ‘Omer, Modia’.
[30] D’après R’ Yéochoua’ Ra’hamim Dufour (2011), pages sur le ‘Omer, Modia’
[31] Synthèse d’après R’ Yéochoua’ Ra’hamim Dufour (2011), pages sur le ‘Omer, Modia’
[32]וספרתם לכם Ousfartem lakhem. Hotsaat Keren Birkat Abraham, Jérusalem, 5766, 180 p.
[33] Pour faire comprendre l’organisation du travail de la période du ‘omer en sept semaines de sept jours, on peut faire image avec le sept couleurs de l’arc en ciel, et de nuances de chacune de ces couleurs. Notons qu’Isaac Newton considérait sept couleurs dans l'arc-en-ciel ; rouge, orange, jaune, vert, bleu, indigo (bleu foncé) et violet.
[34] Le travail du 2ème jour a été décrit comme suit: “dans un amour réel, il faut être capable de garder un certain degré de distance et de respect de l’autre... on doit se demander si notre amour s’exprime de façon appropriée” (R’ Elie Lemmel, “Le moment de réfléchir sur soi-même”, Actualité juive hebdo, n°1208, 3 mai 2012, p. 36). En d’autres termes: Aimer, oui, mais ne pas étouffer la personne aimée par l’expression de son amour. Cela vaut pour un conjoint, pour un enfant, pour un malade, etc..
[35] Parmi les bonnes résolutions à prendre en ce 8ème jour: prendre exemple sur Na’houm Ich Gam Zo qui avait l’habitude de dire pour tout ce qui lui arrivait: ‘Cela aussi c'est pour le bien !’ואמאי קרו ליה נחום איש גם זו דכל מילתא דהוה סלקא ליה אמר גם זו לטובה (T.B. Ta’anit 21a). Un exemple concret de la manière de subordonner la guévoura au ‘héssèd est montré par Na’houm Ich Gam Zo « voulait sans répit attacher [la Royauté] au côté de la Générosité (Héssèd) appelée « bien » et il disait : ‘Cela aussi’, qui semblerait être à gauche liée à la Rigueur (Guévoura) n'est en fait que « pour le bien », elle est attachée à la Générosité (Héssèd). Il disposait sa pensée vers le côté du bien quant à cette mesure-là et occultait ses rigueurs (dinim). C'est une grande façon d'être joint toujours à la Générosité (Héssèd) ». explique R’ M. Cordovéro (1985), p. 92. Ainsi, le 8ème jour du ‘Omer, le processus personnel de libération pourrait être obtenu par travail de cet ordre.
[36] Il s’agit du renforcement contre le yétser hara’ et tout ce qui vient contrarier la réussite dans la pratique des mitsvot. Parmi les bonnes résolutions à prendre en ce 23ème jour, jour de guévoura ché banétsa’h: se battre contre ce qui empêche la concrétisation de nos bonnes intentions. Ainsi si on a l’idée de mettre les téphilines (ou d’étudier la Torah), mais que l’on risque de reporter la réalisation de la mitsva (le téléphone sonne par ex.), on ne se laissera pas détourner de la mitsva.
[37] « Il n’y a pas de doute que la mesure de Tiférète est l’étude de la Torah » écrit R’ Moché Cordovéro זצוק"ל dans Le palmier de Débora. Aussi, en ce 24ème jour, jour de Tiférèt ché banétsa’h, on s’efforcera de financer ceux qui étudient la Torah écrite. Cela peut se faire en finançant des avrékhim qui étudient au moins en partie la Torah écrite ; ou en finançant la publication de livres d’étude de la Torah écrite. Il est possible aussi d’acheter des livres de commentaires sur la Torah écrite et les prêter à qui souhaite les étudier.
[38] Parmi les bonnes résolutions à prendre en ce 37ème jour: il faut se renforcer pour résister à l’épreuve subie avec succès par Yossef hatsadik (ne pas se laisser tenter par une femme interdite).
[39] Parmi les bonnes résolutions à prendre en ce 40ème jour, jour de hod ché bayéssod : être reconnaissant envers Hachèm qui nous a choisi comme peuple et nous a ordonné la mitsva de la circoncision ; apprendre d’un Rav les halakhot concernant la mitsva du respect de la circoncision (chémirat habérit).
[40] Parmi les bonnes résolutions à prendre en ce 41ème jour, jour de Yéssod ché bayéssod : il faut s’efforcer de se sanctifier le plus possible dans le sujet de la chemirat habérit (respect de l'alliance) et éviter tout ce qui peut faire fauter dans le sujet de chemirat habérit. Par exemple rectifier, si nécessaire, son comportement : contrôler la direction de son regard (ne pas regarder les femmes)....
[41] Parmi les bonnes résolutions à prendre en ce 49ème jour, jour de Malkhout ché bamalkhout : pendant la récitation du Chéma’ Yisraël et de Baroukh Chem Kébot Malkhouto…, il faut avoir fortement l’intention de prendre sur soi le joug divin.
[42] Le cinquantième jour après le début du ‘Omer est lié au don de la Torah sinaïtique. Si tel est le cas de nos jours systématiquement, ce jour n’a pas correspondu au 6 Sivan, date de la révélation. Il fut une époque où le nouveau mois était sanctifié après audition des témoins ; Chabou’ot pouvait alors être fêtée le 5 Sivan (si Nissan et Iyar avaient l’un et l’autre 30 jours) ou le 7 Sivan (si Nissan et Iyar avaient l’un et l’autre 29 jours). Alors, Chabou’ot « était bien fêtée au cinquantième jour de l’Omer car elle est effectivement liée à ce compte et non au don de la Torah ». A Chabou’ot coexistent aujourd’hui deux aspects du don de la Torah mouvement de l'homme vers Hachèm; mouvement de Hachèm vers l'homme. L’effort de l’homme est indispensable, mais non suffisant pour le dévoilement de la 50ème porte qui est accordé à l’initiative de D.ieu. Ces deux aspects pouvaient être des moments séparés à l’époque du Temple.
Aujourd’hui encore cela se peut dans le cas du franchissement du méridien de changement de date pendant le ‘Omer. On sait que l’on appelle « méridien d'origine » une ligne nord-sud depuis la conférence internationale sur l’uniformisation des longitudes et de l’heure à Washington (1884). Le méridien Zéro est celui qui passe par Greenwich et il définit 24 fuseaux horaires ; le méridien opposé est celui du changement de date (il passe à l’est de la Nouvelle Zélande). Celui qui voyage et traverse cette ligne de changement de date, comment comptera-t-il le ‘Omer ? R’ R’ M. M. Schneerson, Rabbi de Loubavitch répond : « celui qui est dans ce cas devra poursuivre son propre compte d’après les jours qui sont passés pour lui et qui ne sont pas nécessairement ceux des autres, dans l’endroit où il se trouve après avoir franchi le méridien de changement de date ». D’après R’ M. M. Schneerson, Rabbi de Loubavitch (1999), Likoutéï si’hot, Perspectives hassidiques sur la Sidra de la Semaine, Tome 3, Vaykra, Deuxième série, Ed. Beth Loubavitch, Paris, pp. 186-190. Voir : T.B. Roch hachana 6b.
[43] Cordovéro Moïse (1985), Le Palmier de Dévora, trad. Charles Mopsik, Ed. Verdier, 178 p.
[44] R’ Yéochoua’ Ra’hamim Dufour (2011), pages sur le ‘Omer, Modia’.
[45] R’ M. Cordovéro (1985), Le Palmier de Dévora, Verdier, ch. 5, pp. 91-98.
[46] Trad. R’ Y. R. Dufour א’’שליט.
[47] Trad. Ch. Mopsik in R’ M. Cordovéro (1985), Le Palmier de Dévora, Verdier.
[48] L’initiation de l'homme au secret du ‘Héssèd consiste en ce qu'il aimera Hachèm « d'un amour parfait, au point qu'il ne délaissera Son culte sous aucun prétexte et cela parce que rien ne sera aimé de lui vis-à-vis de l'amour qu'il Lui porte — béni soit-Il ». R’ M. Cordovéro (1985), ch. 5, p. 91.
[49] R’ M. Cordovéro (1985), ch. 5, p. 91.
[50] Explique Ch. Mopsik, R’ M. Cordovéro (1985), note 135, p. 151.
[51] « Instaurer la paix entre un homme et son prochain, qui sont Tiférète et Yessod; parfois l'un s'éloigne de l'autre et il faut les parfaire et les ajuster afin qu'ils soient égaux et attachés ensemble avec amour et affection, ce qui s'effectue grâce à la rectitude de l'acte bon », R’ M. Cordovéro (1985), ch. 5, p. 98.
[52] Trad. Ch. Mopsik in R’ M. Cordovéro (1985).
[53] Trad. R’ Dufour א’’שליט.
[54] « C'est pourquoi [l'homme] ne mettra pas en mouvement le penchant au mal, en sorte de ne pas éveiller la Rigueur. La raison en est que l'homme a été formé avec deux penchants : le bon penchant et le penchant au mal ; le premier est Générosité (Héssèd), le second Rigueur (Guévoura) », R’ M. Cordovéro (1985), ch. 6, p. 99.
[55] R’ M. Cordovéro (1985), Le Palmier de Dévora, Verdier, ch. 7.
[56] R’ Munk traduit Tiféret par « harmonie ».
[57] Trad. Ch. Mopsik in R’ M. Cordovéro (1985).
[58] Trad. R’ Dufour א’’שליט.
[59] « Seulement il faut une attention scrupuleuse pour que l'homme ne s'enorgueillisse pas des paroles de Torah, et qu'il ne cause pas un grand mal ; en effet, de la même manière qu'il s'enorgueillit, il entraîne la mesure de Tiféret, qui est la Torah, à s'enorgueillir et à se retirer dans les hauteurs — D.ieu préserve. En revanche, qui abaisse sa personne dans les paroles de Torah est cause que Tiféret descend et s'abaisse pour s'épancher en bas. » Trad. Ch. Mopsik in R’ M. Cordovéro (1985).
[60] R’ M. Cordovéro (1985), Le Palmier de Dévora, Verdier, ch. 8.
[61] Trad. Ch. Mopsik in R’ M. Cordovéro (1985).
[62] R’ Elie Lemmel (2012), Actualité juive hebdo, n°1208, 3 mai, p. 36.
[63] Trad. R’ Dufour א’’שליט.
[64] R’ M. Cordovéro (1985), Le Palmier de Dévora, Verdier, ch. 8.
[65] Trad. R’ Dufour א’’שליט.
[66] Trad. Ch. Mopsik in R’ M. Cordovéro (1985).
[67] R’ M. Cordovéro (1985), Le Palmier de Dévora, Verdier, ch. 8.
[68] R’ Elie Lemmel (2012), Actualité juive hebdo, n°1208, 3 mai, p. 36.
[69] Trad. Ch. Mopsik in R’ M. Cordovéro (1985).
[70] Trad. R’ Dufour א’’שליט.
[71] R’ M. Cordovéro (1985), Le Palmier de Dévora, Verdier.
[72] Il s’agit « de circoncire le nouveau-né, « c'est-à-dire de faire selon ce qui est requis et commandé afin que toute espèce d'écorce et de prépuce qui colle au Fondement (Yessod) soit circoncis ». C'est pourquoi Pin’has, « lorsqu'il circoncit le prépuce des enfants d'Israël, mérita la prêtrise', parce qu'il se montra généreux envers son Créateur par le secret de la circoncision ; comme il débarrassa le Fondement dudit prépuce, il mérita la Générosité (Héssèd) ». R’ M. Cordovéro (1985), p. 93.
[73] Trad. R’ Dufour א’’שליט.
[74] Trad. Ch. Mopsik in R’ M. Cordovéro (1985)).
[75] Est un paradigme du Fondement et de la Royauté » explique R’ M. Cordovéro (1985), p. 95.
[76] Inviter « les passants, qui sont la Tiferet et le Yessod, pour leur donner un lieu de repos où ils demeureront, c'est-à-dire la Malkhout »… « Quant aux passants, il convient de préparer, à leur intention, nourriture, boisson, accompagnement, c'est-à-dire qu'il faut introduire la Tiferet et le Yessod dans la Malkhout », R’ M. Cordovéro (1985), pp. 95-96.
[77] Ce « qui réalise une Union de Tiferet avec Malkhout en fixant un lieu pour [étudier] la Torah, entraîne que Tiferet se fera un logis dans la Malkhout », R’ M. Cordovéro (1985), p. 96.
[78] Remarque du Pr. R’ Yéochoua’ Ra’hamim Dufour (2011), pages sur le ‘Omer, Modia’. Le terme de psychagogie semble avoir été employé en 1924. Il a été défini comme suit : « traitements psychothérapeutiques permettant de sortir le patient de son état maladif tout en le convainquant de sa valeur personnelle, en lui inspirant la confiance en soi… » A.S. Kronfeld (1924), Psychoteraphie, Berlin. La psychagogie « assigne les buts à atteindre et les problèmes à résoudre [[elle] esquisse une image idéale, un plan de vie » Fr. Baumgarten (1946). In L’année psychologique, pp. 175-176. La psychagogie est distincte de la psychotechnique qui concerne les moyens d’atteindre un but précis pouvant être au service de buts utiles ou condamnables.
[79] R’ Y. R. Dufour précise : « On comprend qu'il ne suffit pas de lire ce commentaire pour l'appliquer, mais il faut prendre un temps de réflexion pour voir concrètement ce qui en découle pour soi-même » (pages sur le ‘Omer, Modia’).
[80] Cité par D. Saada (2006), p. 313.
[81] Cité par D. Saada (2006), p. 313.
[82] L’épanouissement de chaque individu « permet à la collectivité d'actualiser son potentiel de sainteté ». écrit D. Saada (2006), p. 313.
[83] Lorsque l’on disposait du colorant adéquat, le תכלת (tékhélèt).
[84] דתניא רבי מאיר אומר מה נשתנה תכלת מכל הצבעונין מפני שתכלת דומה לים וים דומה לרקיע ורקיע דומה לאבן ספיר ואבן ספיר דומה לכסא הכבוד דכתיב (שמות כד) ויראו את אלהי ישראל ותחת רגליו וגו' וכתיב (יחזקאל א) כמראה אבן ספיר דמות כסא (T.B. ‘Houlin 89a). והכסא דומה לספיר (T. Y. Bérakhot 1, 2).
[85] Midrach Vayikra raba 4,6, cité par D. Saada (2006), p. 315.
[86] Midrach Dévarim raba 7, 8 cité par D. Saada (2006), p. 315.
[87] Une relation entre l’harmonie et le décompte du ‘omer a pu être avancée : elles proviennent de la même source sur le plan spirituel. R’ Akiva Tatz (2001), La trame de la vie, Targum Press, Jérusalem, p. 170.
[88] C’est aussi la guématria de א־ל חי (E-l ‘Hay, qui renvoie à la notion de yésod, fondation - R’ E. Lemmel, A.J., 3 mai 2012). Après ces 49 étapes du travail intérieur (travail « invisible » de l’extérieur tout comme les fondations d’un bâtiment) l’être humain se trouve prêt à recevoir la Torah.