37* CHELA’H LEKHA (Bamidbar 13, 1 – 15, 41)
שְׁלַח־לְךָ֣– Envoie pour toi
Résumé
Moché envoie douze explorateurs - les chefs des tribus - reconnaître le pays de Kéna’an (Chap. 13). A leur retour, après 40 jours, ils font un rapport très négatif : dix d’entre eux « médirent contre la terre… » (וַיֹּצִ֜יאוּ דִּבַּ֤ת הָאָ֨רֶץ֙ - 13, 32) et décrivent un peuple semblant invincible. Le sujet du lachon hara’ est donc de nouveau au centre de la présente paracha, après avoir été évoqué dans la paracha précédente (Myriam, pensant bien agir envers l’épouse de Moché, a critiqué son frère).
Après le rapport négatif des dix explorateurs, seuls Yéhochoua’ben Noun et Kalèb ben Yéfouné font entendre un avis positif et tentent d’affermir la confiance en Hachèm (13, 30). Notons que Kalèb est le mari de Myriam : lorsqu’il tente de rectifier le lachon hara’ des explorateurs, la Torah indique qu’il bénéficie de l’influence de son épouse : ר֤וּחַ אַחֶ֨רֶת֙ עִמּ֔ו « il a été animé d’un autre esprit » (14,24).C’est unesorte de réhabilitation de Myriam [1].
Le témoignage tendancieux des dix explorateurs visent à détourner le peuple de la conquête de la terre de Kéna’an. Des conséquences désastreuses en découlent : les explorateurs proposent de retourner en Egypte, démoralisation des Hébreux qui pleurent en entendant leur compte rend[2], plaintes à l’encontre de Moché, tentative de lapidation de Yéhochoua’ et Kalèb, et même de Moché[3] et Aharon ce qui entraîne l’intervention de Hachèm (Chap. 14).
La punition divine tombe : l’entrée dans le Pays sera retardée et ce sera la génération suivante qui entrera en Erets Israël. Moché implore la clémence divine mais les enfants d’Israël sont condamnés à demeurer dans le désert jusqu’à ce que toute la génération sortie d’Egypte disparaisse : un an pour chaque jour qu’a duré l’exploration du pays. Il faudra donc attendre trente-huit années supplémentaires avant d’entrer dans le pays de Kéna’an. La chute du niveau spirituel qui résulta de l’affaire des explorateurs sera la cause de la guerre de conquête qu’il faudra livrer au lieu d’entrer facilement dans une conquête rapide et irresistible. Moché et Aharon ne pourront entrer dans le pays.
Le peuple pleure en prenant conscience de l’énormité de la faute commise : il souhaite racheter son erreur. Un groupe, sans plus attendre, part à la conquête du pays malgré les efforts de Moché pour les en dissuader (14,40). Sans soutien divin, cette tentative est vouée à l’échec : les combattants hébreux sont durement frappés par les Amalécites et les Cananéens(14, 44-45).
Pourtant, malgré la faute des explorateurs, Hachèm confirme qu’Il n’a pas modifié Sa volonté de donner la terre de Kéna’an aux Hébreux. כִּ֣י תָבֹ֗אוּ אֶל־אֶ֨רֶץ֙ « Quand vous viendrez dans le pays » אֲשֶׁ֥ר אֲנִ֖י נֹתֵ֥ן לָכֶֽםque je vous donne »(15,2). Et Il le démontre en prescrivant plusieurs lois destinées à être appliquées lorsque le peuple aura conquis le pays : libation de vin (15,7) [4], absence de discrimination envers l’étranger (15,13-16) et prélèvement pour le Cohen d’une part de la pâte – la ’hala (15,17-21).
La paracha présente aussi plusieurs lois: lapidation en cas de transgression délibérée du chabbat et prescription et signification des franges devant être portées au quatre coins d’un vêtement (tsitsit) : il s’agit de se souvenir des commandements divins pour les observer (15, 37-41). [5]
[1] R’ E. Munk, Kol hatorah, Bamidbar 14, 24,p. 140. TB Sota 11b.
[2] Cela s’est produit le neuvième jour du mois d’Ab.
[3] Déjà, après la contestation de l’étape de Réfidim Moché avait dit à Hachèm : « Que ferai-je à ce peuple ? Encore un peu, et ils me lapideront. » (Chémot 17, 3).
[4]Une libation de vin accompagnait les sacrifices de 'ola et de chélamim accomplis toute l’année. וְיַ֥יִן לַנֶּ֖סֶךְ שְׁלִשִׁ֣ית הַהִ֑ין « Du vin pour libation, un tiers de hin. » La joie qui suit la consommation de vin exclut le 'hatat et le acham (R' Shimchon Raphael Hirsh זצ"לsur Bamidbar 15,16). Equivalents modernes : 1 hin = 4,1 litres (environ. Selon les estimations de R’ A.H. Noéh זצ"ל. Cit. R’ Arié Carmell, Aide à l’étude du Talmud, Marome, Paris, pp. 80-81, 1994). Un tiers de hin correspond donc environ à 1,4 litre.
[5] Autres orthographes pour Chéla’h lékha: Shelach Lécha, Chela'h lekha