(דָּגֵשׁ חָזָק,daguèch ‘Hazak)
Il se place après une lettre ponctuée d’une voyelle courte (רַבִּים)
Il ne se met pas au début ou à la fin d’un mot sauf dans les cas suivants :
. après l’article
. après le waw d’inversion
. après le pronom interrogatif mah [1].
On l’appelle également : daguèch de redoublement [2].
Il indique toujours le redoublement de la consonne dans laquelle il se trouve, quelle que soit la raison de son emploi [3]. La consonne est donc prononcée comme si elle se trouvait doublement dans le mot: הַמִּזְבֵּ֔חַ (hamizbéa’h) ;חֻקַּ֤ת (‘houkkat) ; הַשֵּׁנִית (se prononce comme : הַשְׁ-שֵׁנִיתhach-chénit [4]). Ce type de procédé est comparable à ce qui se faisait dans la langue allemende: un petit trait au-dessus d'une lettre en indique le redoublement [5].
La séparation entre syllabes passe à l’intérieur de la lettre daguéchée (avec un daguèch): la première consonne ferme la syllabe précédente, la seconde consonne marquée par le daguèch commence la syllabe suivante. Ledaguèch fort peut se trouver dans toutes les lettres (y compris lesconsonnes de la classe ת’’ בגדכפBéGaDKéFaT ). Mais on ne le trouve pas dans les lettres gutturales en principe : א ה ח ע et le ר assimilé aux gutturales.
Noter cependant quelques très rares exceptions qui existent pour la lettre rech [6] et pour la lettre aleph - voir ci-après la section sur le "mapik aleph" [7].
On compte trois catégories de daguèch fort.
Le daguèch fort de compensation d’une lettre élidée est dit daguèch de remplacement ou d’assimilation.
Il sert « à compenser une lettre assimilée » [8] même si elle est remplacée par une voyelle longue accentuée:
. dans la conjugaison à l’inaccompli des verbes dont la racine contient unנet conjugués: ainsi אֶפֹּלle daguèch fort du פrappelle la disparition du נ de la racine נפל ) [9] (le remplace en quelque sorte);
. dans la conjugaison, lorsque la terminaison commence par la même lettre que la dernière lettre du verbe, on ne l'écrit qu'une seule fois, et le daguèch fort remplace la lettre disparue [10];
. témoin de l’assimilation d’une lettre. Mine (= de) Chaoul passe de Mine Chaoul à MineChaoul puis Michaoul (le noun non vocalisé de Mine est replacé par le daguèch du chin - qui témoigne de cette assimilation) [11].
. de l’article défini sous sa forme normale(à savoir hé vocalisé patah’ suivi du daguèch fort dans la première lettre du nom) [12] ;
. des conjugaisons verbales « intensives »
. le daguèch fort sur la 2ème lettre radicale est caractéristique d’une conjugaison « intensive » : accompli, 3èmes personnes du masculin singulier, pi’el, pou’al, hitpa’el. Exemples avec la racine קשׁר: קִשֵּׁר קֻשַּׁר [13];
. verbes dont la 2ème et 3ème radicales sont identiques (redoublement de la 2ème lettre de la racine): ainsiתָּסֹבִּי « tu entoureras » au féminin, avec accent sous le sama’h (de סָבֹב) [14] ; יָמֹדּוּ (de מָדֹד)[ 15].
. du waw conversif devant l’inaccompli (daguèch fort dans la lettre suivante) [16] ; ainsi, dans וַיִּקְרָא un daguèch se trouve après le וַdansיִּ.
Ce daguèch marque une lettre redoublée afin de rendre le son harmonieux) [17] ;
. après une syllabe accentuée. Comme dans הָאֵלֶּה (הָאֵ֔לֶּה Béréchit 22,1). Noter : lorsque ce redoublement est omis pour raison d’euphonie, le daguèch fort de redoublement disparaît et est remplacé par un petit trait horizontal (qui a pour nom raphé) au dessus de la lettre [18] - souvent omis.
. causé par le lien étroit entre deux mots. On distingue deux cas en fonction de la place de l’accent du premier mot
Si l’accent se situe sur la dernière syllabe du premier des deux mots, c’est le dé’hik (ou da’hik, דחיק). Ce nom exprime le fait que ce daguèch « fait une percée » se mettant entre deux mots. C’est un daguèchconjonctif, comme dans le lamed de : יַֽעֲשֶׂה־לְּךָ֤ (I Chémouel 3, 17).Le second mot est relié au premier par un makaf suivi du dé’hik ; le premier se termine ici par le suffixe éh. On peut trouver d’autres suffixes (ha, éh, kha, ta).
Si l’accent se situe sur l’avant-dernière syllabe du premier des deux mots, c’est le até méra’hik (ou Até méra’hek). Ce nom exprime le fait que ce daguèch « vient de loin », a une « cause éloignée ». On l’explique par la présence d’un ta’am serviteur, d’un accent paroxyton, et du kamats à la fin du mot. Exemple : קָרָ֣אתָ לִּ֔י(I Chémouel 3,5) [19].
Noter aussi- On peut trouver un daguèch fort si le mot se termine par un kamats, et se trouve en position pausale (sous ta'am sof passouk ou atnah’). Ainsi : אוֹדֶֽךָּ׃ (Téhilim 30, 13), אֲרֽוֹמְמֶֽךָּ׃ (Téhilim118, 28).
Après une voyelle brève non accentuée : daguèch dans la lettre qui suit [20]. Ainsi :הַזּיו(mais זיו) ; מִלֵּב (mais לֵב).
[1] Binyamin Tubiana, Le dikdouk facile. Cahier d’exercices. Leçon 5, Biblieurope (s.d .).
[2] Il est représenté par un point gras dans le tikoun ich Maçlia’h ;il est identifié par deux points accolés et en gras dans le sidour de ‘Amram Abguil (2009), Tephila zaka, Jérusalem.
[3] Weingreen J. (2004), p. 24.
[4] Anonyme, http://dikdouk.free.fr/, consult. août 2007.
[5] Rabbinowicz (1864), Grammaire hébraïque, pp. 20-21.
[6] Il existe 17 cas de rech avec daguèch dans le Tanakh (c’est à dire de r redoublé, ainsi: הַרְּעִמָהּ (I Chémouel 1, 6); הַרְּאִיתֶם֙ I Chémouel 10, 24; הַרְּאִיתֶם֙ I Chémouel 17, 25; לֹא-כָרַּתשָׁרֵּךְ(Yé’hezkiel 16, 4) ; הַרְּאִיתֶם֙ II Mélkakhim 6, 32 ; רָּ֑ע Yirmiyah’ou 39, 12;רֹּאשׁ֙ ‘Hababouk 3, 13; רָּ֣ע Téhilim 52, 5; לְשָׁרֶּךָ(Michlé. 3, 8); רָּ֑ע Michlé 11,21; מָרַּ֣ת Michlé 14,10; מַֽעֲנֶה־רַּ֭ךְMichlé 15,1;רֵּ֣ים Yéob 39,9;שֶׁרֹּאשִׁי֙ Chir hachirim 5,2;רֹּ֔אשׁ ‘Ezra 9,6; מִקְנֶה־רַּב֙ II Dibré hayamim 26,10.Notons aussi que laSeptante transcrit Sarah en doublant le « R » : Sarra au lieu deשרה (qui aurait dû être transcritSara).
[7] Le aleph contenant un point intérieur est listé comme "Lettre hébraïque aleph mapiq" (sous le code FB30) dans la liste de caractères du Standard "unicode", version 5.0, http://unicode.org/fr/charts/PDF/UFB00.pdf(consult. déc. 2011
[8] R’ David Berdah, 3e Ed., p. 5.
[9] http://dikdouk.free.fr/consult. août 2007.
[10] M. Hororwitz (2000), p. 22.
[11]Ainsi en est-il en français pour des mots empruntés au latin : in-légal devient “illégal” avec doublement du « l »; in-religieux devient “irreligieux” avec doublement du « r » (de même pour in-réparable/ “irréparable”).
[12] A. Tichit (2007), p. 19.
[13] Weingreen J. (2004), p. 25; Tichit A. (2007), p. 19.
[14] R’ David Berdah, 3e Ed., p. 6; dikdouk.free.
[15] R’ David Berdah, 3e Ed., p. 6.
[16] A. Tichit (2007), p. 19.
[17] Weingreen J. (2004), p. 25; Tichit A. (2007), p. 19.
[18] Weingreen J. (2004), p. 26.
[19] Autres exemples: yéhaléloukha sélah (sama’h de sélah avec Até méra’hek) ; chékakha lo (lamed de lo avec Até méra’hek).
[20] R’ David Berdah, 3e Ed., p. 6.